Vins de la Côte de Nuits



La Côte de Nuits s’allonge depuis la banlieue de Dijon jusqu’à Corgoloin, au sud de Nuits-Saint-Georges, sa petite capitale. Plus étroite que sa sœur la Côte de Beaune, elle est également construite sur un relief de failles, remanié par les chamboulements tertiaires. Entaillée par des combes, elle déroule un tapis géologique extraordinairement compliqué, qui peut varier mètre à mètre. C’est le paradis des rouges bourguignons. Le pinot noir y règne quasi seul, impérial, avec sa bousculade de grands crus, dont les noms suffisent à faire saliver les amateurs du monde entier. Le vignoble nuiton couvre environ 3800 hectares (Hautes Côtes incluses).



Marsannay. Rouge solide, généreusement fruité, aux arômes de prune et de baies noires - Rosé de couleur saumonée, parfumé, délicat en bouche (obtenu par saignée, il fut longtemps la spécialité du village) - Blanc charnu et expressif, aux notes d’agrumes et de fruits exotiques. L’aire d’appellation inclut Couchey et déborde sur Chenôve, où se situe son plus célèbre lieu-dit, le Clos du Roi. Autres bons climats : Longeroies, Grasses Têtes, Echézeaux, Vaudenelles, Saint-Jacques.

Fixin. Rouge de teinte violine, tannique, charpenté, aux nuances de cassis, de mûre et de griotte. Un peu sévère au départ, il vieillit ensuite remarquablement - Blanc confidentiel. Premiers crus remarquables : Clos du Chapitre, Clos Napoléon et surtout Clos de la Perrière (monopole).


Les pressoirs du duc de Bourgogne, à Chenôve


Gevrey-Chambertin. Rouge robuste et vigoureux, de couleur soutenue, grenat violet. Sa structure puissante le destine à vieillir longtemps, sur des arômes giboyeux et réglissés. Cette carrure naturelle est souvent renforcée par un boisage appuyé. L’aire du Gevrey-Chambertin empiète sur la commune voisine de Brochon. Le vignoble encadre la combe de Lavaux, dont les débris se sont largement épandus vers la plaine. Les premiers crus les plus réputés se situent au débouché de cette combe : Clos Saint-Jacques, Cazetiers, Combe aux Moines, Lavaux Saint-Jacques. Mais l’appellation brille surtout par sa mirifique collection de grands crus, qu’on découvre en pied de coteau et à mi-pente, au sud du village. Neuf seigneurs brandissant tous le drapeau du premier d’entre eux : Chambertin, dense, corpulent, complet, d’un exceptionnel potentiel de garde - Chambertin Clos de Bèze, complexe, d’une extrême finesse, d’une distinction souveraine au vieillissement (peut endosser l’appellation précédente) - Mazis-Chambertin, fortement aromatique, étoffé, de longue garde - Latricières-Chambertin, bien tramé, au bouquet expansif - Griotte-Chambertin, élégant, savoureux, généreusement parfumé de petits fruits rouges - Chapelle-Chambertin, distingué, le plus précoce des neuf - Ruchottes-Chambertin, charnu et apte à la garde - Charmes-Chambertin, soyeux et gracieux, d’un bel éclat aromatique - Mazoyères-Chambertin, souple et charmeur (peut endosser l’appellation précédente).


Sous le clos, le village de Morey-Saint-Denis
 

Morey-Saint-Denis. Rouge aux arômes de fruits noirs (cassis, mûre, myrtille), solide et vieillissant bien ; en se rapprochant de Chambolle-Musigny, il se révèle plus souple et framboisé. Le vignoble de Morey-Saint-Denis remonte jusqu’à l’entrée de la petite combe Grisard. Premiers crus remarquables : Clos Sorbé, La Riotte, Millandes, La Bussière, Clos des Ormes, Charmes, Ruchons - Blanc rare (premier cru Monts Luisants). Le village s’enorgueillit surtout d’un quinté de grands crus : Clos de la Roche, puissant et dominateur, riche en fruits noirs - Clos Saint-Denis, réservé et délicat - Clos des Lambrays, élégant, de garde (monopole) - Clos de Tart, tannique et profond, de grande longévité (monopole) - Bonnes Mares, pour une petite partie.

Chambolle-Musigny. Rouge tendre et soyeux, délicieusement aromatique (fraise, framboise). Le vignoble de Chambolle-Musigny s’étend au sortir des combes de Chamboeuf et d’Orveau, occupant les sols bien aérés de leurs éboulis calcaires. Premiers crus remarquables : Charmes, Combe d’Orveau et surtout Amoureuses, donnant un vin de soie, caressant et parfumé. Mais le village doit d’abord sa réputation à ses grands crus, un duo fameux : Musigny, suave et raffiné, d’une précocité qui n’exclut pas la longue garde (à signaler la micro-production du Musigny blanc, monopole du Domaine de Vogüé) - Bonnes Mares, plus corpulent, plus étoffé, sur les épices et la violette.
 



Le Clos de Vougeot
 

Vougeot. Rouge plutôt corsé, issu essentiellement de quelques premiers crus (Clos de la Perrière) - Blanc en petite production (premier cru Clos Blanc). Le village reste universellement connu pour son célébrissime grand cru, le Clos de Vougeot (voir ci-dessous).


Clos de Vougeot, la "maison des champs"

Le clos le plus fameux de Bourgogne possédait déjà sa superficie définitive au début du XIVe siècle. Vers 1110, l’abbaye de Cîteaux reçut en donation une terre qu’elle défricha et planta en vigne. Cette parcelle initiale fut agrandie par d’autres dons, par divers achats ou échanges, et l’ensemble mis en valeur par des moines-vignerons particulièrement inspirés. Autour de 1550, pour leur servir de résidence champêtre, fut bâtie la résidence des abbés - l’actuel château, qui vint s’ajouter aux installations purement vinicoles du Moyen Age. Cet élégant bâtiment Renaissance jouxte des parties romanes sublimement conservées. On ne peut que s’extasier devant la cuverie du XIIIe siècle, aux toits descendant presque à terre et abritant quatre monumentaux pressoirs à vis, miraculeusement sauvés, devant aussi le cellier du XIIe siècle, et la forêt de poutres de son extraordinaire charpente.

Le clos lui-même, entièrement ceint de murs, conserva son intégrité foncière jusqu’à la fin du XIXe siècle. Par le jeu des successions, sa cinquantaine d’hectares est aujourd’hui partagée entre près de quatre-vingt propriétaires. Le Clos de Vougeot donne un nectar profond, puissant, étoffé, du moins dans son archétype. En réalité, il est diversifié à l’extrême par les nuances du terroir (la partie supérieure est considérée comme la meilleure) et par la patte des vinificateurs.



Vosne-Romanée. Rouge de grande finesse, odorant, charnu et long en bouche, d’un remarquable potentiel de garde. Parmi les vins de la Côte de Nuits, il atteint sans doute l’équilibre idéal. L’aire du Vosne-Romanée inclut une partie de la commune voisine de Flagey-Echézeaux. Premiers crus remarquables : Suchots, Malconsorts, Beaux Monts, Cros Parentoux. Le coeur du coteau, au-dessus du village, abrite la guirlande magique des huit grands crus : Romanée-Conti, subtil, complexe et fascinant, le vin mythique par excellence (monopole) - La Romanée, irrésistiblement harmonieux et distingué (monopole) - La Tâche, ample, concentré, profond, d’une force d’expression sans pareille (monopole) - Richebourg, généreux, corsé, intensément bouqueté - La Grande Rue, solide et vigoureux (monopole) - Grands Echézeaux, floral et élégant - Echézeaux, le plus précoce des huit (on le récolte sur une superficie importante).


La croix emblématique de La Romanée Conti


Nuits-Saint-Georges. Rouge tannique et chaleureux, évoluant bien en bouteilles ; aux abords de Vosne, il conserve un style plus charnu. A l’aire du Nuits-Saint-Georges est rattachée, au sud, une partie du vignoble de Prémeaux-Prissey. Premiers crus remarquables : Saint-Georges, Cailles, Vaucrains, Damodes, Clos des Corvées, Clos de la Maréchale, Clos de Thorey, Clos Saint-Marc - Blanc en infime volume.


Les autres Hospices

On les connaît moins que leurs homologues de Beaune. Pourtant, comme eux, ils sont à la tête d’un enviable patrimoine viticole. Les Hospices de Nuits ont été fondés en 1633 et poursuivent, aujourd’hui encore, leur vocation médico-sociale. Leur vignoble s’éparpille de Prémeaux à Gevrey-Chambertin et, sur Nuits même, compte plusieurs premiers crus, comme Les Saint-Georges ou Les Porets. Ils vinifient eux-mêmes leur production, dans leurs propres caves. Comme ceux de Beaune encore, les Hospices de Nuits dispersent chaque année leur nouvelle récolte, au cours d’une vente à la chandelle qui a lieu au Clos de Vougeot, le dernier dimanche de mars. Les cuvées mises aux enchères portent le nom des fondateurs (Cuvée Guillaume Labye, Cuvée des Soeurs Hospitalières ...) ou celui de grandes figures nuitonnes : la Cuvée Fagon, en hommage au médecin de Louis XIV, la Cuvée Camille Rodier, en mémoire du cofondateur des Chevaliers du Tastevin.



Côte de Nuits-Villages. Rouge produit aux deux extrémités de la côte, sur les communes de Fixin, Brochon, Prémeaux-Prissey, Comblanchien et Corgoloin. Les vins sont assez tanniques au nord, plus ronds au sud.

Bourgogne Hautes-Côtes de Nuits. Rouge gouleyant et fruité (framboise, groseille, cassis) - Blanc aux arômes d’agrumes, conjuguant rondeur et fraîcheur, grâce à l’altitude du vignoble. On récolte ces vins faciles sur les hauteurs de l’arrière-côte, entre Reulle-Vergy au nord, et Magny-lès-Villers au sud.


Tous droits réservés © 2012, Michel Mastrojanni (texte et photos)

 




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